Aucun détail n’a été donné sur les modalités pratiques de cette réécriture, la proposition de loi « sécurité globale » ayant déjà été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale et transmise au Sénat.
Ce n’est pas un abandon, mais cela y ressemble. Après une réunion à l’Elysée, les présidents des groupes parlementaires de la majorité à l’Assemblée nationale ont ouvert une porte de sortie à la crise politique autour de la proposition de loi sur la « sécurité globale ».
Lors d’une conférence de presse, Christophe Castaner, président du groupe La République en marche (LRM) à l’Assemblée nationale, et ses collègues du MoDem, Patrick Mignola, et du groupe Agir, Olivier Becht, ont annoncé, lundi 30 novembre, la réécriture complète de l’article 24 de cette proposition de loi contre laquelle des dizaines de milliers de personnes ont manifesté samedi en France au nom de la liberté d’informer. Aucun détail n’a toutefois été donné sur les modalités pratiques de cette réécriture, la proposition de loi « sécurité globale » ayant déjà été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale et transmise au Sénat.
« Ce n’est ni un retrait ni une suspension »
« Nous allons proposer une nouvelle écriture complète de l’article 24. (…) Cette nouvelle rédaction sera conduite dans le cadre d’un travail collectif aux trois groupes parlementaires de la majorité », a déclaré M. Castaner, alors que les députés ont déjà donné leur feu vert à la proposition de loi dans laquelle est cet article, mercredi 25 novembre.
« Nous savons que des doutes persistent encore » et « nous devons éteindre ces doutes », car « lorsqu’une telle incompréhension ne cesse de s’intensifier sur un sujet aussi fondamental nous avons le devoir de nous interroger collectivement », a-t-il justifié lors de cette conférence de presse au Palais-Bourbon. « Ce n’est ni un retrait ni une suspension, mais une réécriture totale du texte », a affirmé M. Castaner, en parlant d’« une proposition que [les trois groupes parlementaires feront] au gouvernement ».
Dès lundi soir, « nous rencontrerons le premier ministre et les membres du gouvernement concernés pour un premier échange », a poursuivi M. Castaner. « Nous pourrons alors, dans ce cadre et dans le cadre de nos prérogatives constitutionnelles respectives, discuter du véhicule législatif et du calendrier ».
M. Becht, président du groupe Agir à l’Assemblée, a évoqué la possibilité de recycler l’article 24 dans le projet de loi contre les « séparatismes », dont l’article 25 reprend l’esprit de la mesure, selon des responsables de la majorité. « C’est un premier recul. Mais nous voulons le retrait de cet article et de toute la loi “sécurite globale” », a réagi le secrétaire national du Parti communiste français (PCF), le député Fabien Roussel ; le groupe La France insoumise (LFI) réclame également la suppression pure et simple de la proposition de loi. « L’exécutif et sa majorité vont d’erreur en erreur », a estimé le président des sénateurs Les Républicains (LR), Bruno Retailleau, ajoutant que la réécriture de l’article « dépend désormais du Sénat ».
Darmanin auditionné à l’Assemblée
L’article 24, qui interdit la diffusion d’images des membres des forces de l’ordre dans l’intention de nuire à leur intégrité « physique ou psychique », est vigoureusement dénoncé depuis la mi-novembre par les syndicats de journalistes et les groupes de défense des droits humains, qui y voient une grave atteinte à la liberté de la presse.
Le débat sur l’article 24 a été alimenté la semaine dernière par la diffusion des images de l’interpellation brutale d’un producteur de musique, Michel Zecler, par des policiers le 21 novembre à Paris. Emmanuel Macron a estimé vendredi soir que cette violente interpellation relevait d’une « agression », dont les images « font honte », et demandé au gouvernement de travailler à une réaffirmation du « lien de confiance » entre la population et les forces de l’ordre.
De son côté, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, sera entendu lundi à 18 h 15 par la commission des lois de l’Assemblée nationale, après une visioconférence à huis clos en matinée avec les membres LRM de cette commission, puis mardi à 17 heures avec l’ensemble du groupe.
(Le Monde)